|
Deuxième
Exposition en plein air du groupe Gutai
YOSHIHARA
Jirô, juillet
1957
Lors
de la 2e exposition " Gutaï " qui s'est tenue l'été
dernier dans pinède d'Ashiya City, près Kôbe,
KANAYAMA Akira présenta une uvre qui avait pour
sujet la forme d'une empreinte de pied. Elle était constituée
,une bande blanche en vinyle avec des empreintes de pieds noires.
La bande mesurait plus 100 m de long. Elle serpentait s toute
l'exposition et, pour finir, grimpait dans un pin.
TANAKA
Atsuko présenta 7 silhouettes humaines gigantesques, qui
étaient toutes très simples et d'une forme semblable.
Elles n'exprimaient aucun sentiment humain. Etranges et même
sinistres, elles contenaient un chapelet d'ampoules tubulaires,
qui figuraient un squelette. Ces ampoules étaient éclairées
automatiquement à intervalles réguliers et le courant
lumineux évoquait la circulation sanguine.
|
 |
Affiche
exposition 1957 |
Ces
deux uvres sont tout à fait inhabituelles pour des
artistes Gutai qui ont renié toute forme naturelle. Il est
cependant très intéressant que ces artistes aient
traité la forme de la façon la plus simple et la plus
sèche. Il ne fait aucun doute que c'est la forme qui, ici,
nous sollicite mais, au-delà de cette dispute, ces uvres
sont ambitieuses et audacieuses et tout à fait réussies,
étant donné les conditions particulières de
cette exposition en plein air. L'uvre de KANAYAMA, ces centaines
de pieds sur une bande blanche, n'était pas ennuyeuse pour
les spectateurs. La bande en vinyle pouvait être étirée
facilement dans toutes les directions et le génie de l'artiste,
qui avait fait grimper la bande dans un pin, nous donna une impression
poétique .
Une
autre uvre de KANAYAMA était le signal d'alarme d'un
passage à niveau. Il l'avait emprunté à
une compagnie ferroviaire. Deux signaux lumineux rouges s'éclairaient
alternativement et la sonnerie retentissait tout le temps. Le
rythme de la sonnerie coïncidait avec celui du signal lumineux
et le site était empli d'une étrange atmosphère.
L'uvre de TANAKA, le groupe des 7 silhouettes, était
intitulée "costumes de scène", ce que
je trouvais difficile à expliquer. L 'uvre était
directement inspirée d'une autre silhouette humaine,
présentée à une exposition patronée
par la "Shinko Press" à Kobe.
Depuis
le mois d'avril au cours duquel un journaliste de Life était
venu faire un reportage sur les artistes du groupe Gutai, TANAKA
s'était intéressée à une série
de costumes du monde entier parmi les plus étranges et
ceci apparaît en partie dans les photos de son uvre,
prises par Life. Son idée s'inspirait de mon propre projet
d'organiser une exposition artistique sur la
scène d'un théâtre. Elle voulait présenter
un certain nombre de costumes, faits par elle, qu'elle porterait
à tour de rôle. Quelques uns comportaient un grand
nombre d'ampoules électriques. Elle en présenta
deux à l'exposition en plein air. L'une, avec des ampoules
dans le corps, rendait tout son effet quand elle était
placée à côté des 7 silhouettes. L'autre,
avec une quantité d'ampoules ordinaires disposées
en forme de croix, clignotant toutes lentement et simultanément,
était très vivante.
|
 |
Tanaka
Atsuko - personnages -
|
L'objet
de son uvre était le costume et non la forme humaine.
Cependant elle tira de cette forme humaine un effet particulier, pour
cette exposition, et ce fut vraiment un succès, vu le sentiment
de fraîcheur que nous avons ressenti.
SHIMAMOTO
Shozo de son côté peignit son uvre sur un carré
de 30 pieds de vinyle rouge. Plus exactement: il prit un canon,
le remplit d'émail de diverses couleurs, et le fit exploser
contre le tissu de vinyle. De toutes les uvres expérimentales
produites au moyen de forces mécaniques afin de dépasser
la rapidité des brosses manuelles, c'était certainement
l'une des plus représentatives de l'ardeur de l'artiste.
SHIRAGA
Kazuo présenta une uvre très différente
de celle de l'an dernier. Comme la précédente, elle
était faite avec de la boue. Il couvrit la boue d'une enveloppe
de vinyle transparente dont la forme nous rappela l'une de ces
sucreries que l'on déguste en été au Japon,
appelées " Kuzumanju " . Son désir premier
d'action se transformait en une volonté de créer
quelque chose de fou. Cela ressemblait à un énorme
poisson gélatineux. Il y avait deux uvres et l'une
portait une chevelure faite de cordes de chanvre peintes en vert.
De toute manière, elles ressemblaient trop à des
choses vivantes.
|

|
 |
Yamzaki
Tsuruko
|
YAMAZAKI
Tsuruko dressa une toile en vinyle rigide, rouge écarlate,
telle une moustiquaire. Cela donnait l'impression qu'elle ne voulait
rien montrer d'autre que "qualité" et "masse".
Cela reflétait de façon admirable,s l'équilibre
entre l'esprit de l'artiste et la matière.
MURAKAMI
Saburo fit une étrange 1nstallation où l'on était
convié à pénétrer et d'où l'on
pouvait entrevoir le ciel. C'était une tente ronde en toile,
sur laquelle était placé un cylindre en zinc. L'intérieur
du cylindre était peint en rose et, quand nous pénétrions
dans la tente, nous pouvions voir à travers le cylindre rose
le Ciel bleu de l' été. L' uvre était
comme une trappe destinée à saisir la nature elle-même.
Je découvris en MURAKAMI un poète mais j'étais
en même temps charmé de ce que l'installation ne suscitât
aucun sentiment artistique.
Comme
d'habitude, MOTONAGA Sadamasa avait introduit l'eau dans son uvre.
Ses sacs remplis d'eau colorée étaient devenus plus
complexes. Son autre travail se composait d'un bac étroit
et oblong; à la surface de l'eau flottaient des lanternes
de cellophane. Le souffle du vent leur imprimait un mouvement fantastique.
Toute la beauté des traditionnelles lanternes japonaises
flottant par une nuit d'été revivait dans cette oeuvre.
On pourrait dire la même chose du cerf-volant de SHIBATA Takeshi.
Bien
des uvres à cette exposition traitaient de la lumière
et effet, la nuit, était splendide. La
moustiquaire de YAMASAKI, par exemple, devenait dans obscurité
une énorme lanterne rouge.
Au
milieu de toutes ces pièces de grande taille, celles de YOSHIHARA
Michio étaient impressionantes parcequ'elles étaient
toutes petites : toutes trois étaient des trous, d'un pied
de profondeur, dans la terre, et au fond de chacun brillait une
lumière sur 3 pouces de diamètre. SUMI Yasuo exposait
presque la même uvre que l'année dernière,
mais elle était devenue plus compréhensible et plus
riche.
|
 |
 |
Kayanama
- expansion - |
Kayanama
- machine à peindre - |
TYOSHIDA
Toshio présenta un tableau dans lequel étaient incorporés
des fragments de miroir et qui s'avéra la meilleure de toutes
les uvres de cette série. Lorsque la moustiquaire de
YAMASAKI Tsuruko, placée à côté, était
agitée par le vent, le miroir étincelait d'un éclat
fantastique.
J'ai
parlé d'un certain nombre d'uvres présentées
à notre exposition en plein air; comme il y avait beaucoup
de nouveaux venus, l'exposition était donc plus importante
que l'an dernier .
Il
est nécessaire, dans une exposition en plein air, de tenir
particulièrement compte de la lumière et du temps,
mais nous pouvons y agir plus librement et résister avec
succès à l'art de salon ce qui est impossible intramuros.
Voilà pourquoi nous organiserons périodiquement ce
genre d'expositions.
Traduction
française, Robho.
|
 |
|
|
|