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Action et avant-gardes

Okabe Aomi
Extrait de son texte paru dans le catalogue " Japon des avant-gardes "

Mavo avait fleuri à Tokyo, en plein désordre, après le grand tremblement de terre de 1923. Après la Seconde Guerre mondiale, on retrouve dans le kansaï -région de Kyoto, Osaka et Kôbé, zone moins éprouvée par le conflit que celle de Tokyo- un contexte chaotique similaire à celui qu'avait connu Mavo. C'est là qu'apparaît Gutai. Mais si mavo se réclamait d'une destruction dada, Gutai adopte une autre démarche : c'est sur les ruines qu'il établi les fondements de son esthétique. Dans ce qui a été détruit, Gutai recherche et met en valeur une vie faite de substances inconnues, redécouvre ce corps primitif que les systêmes n'ont pas encore asservi, retrouve la joie sans mélange de la création. Yoshihara, organisateur de Gutai, reconnaît lui même avoir été influencé par des groupes comme Action Mavo ou la Sanka. De quatre ans plus jeune que Murayama, il a fait partie de la Nika (deuxième section), société dont mavo dénonçait la toute puissance. Et, bien sur, il connaît pour les avoir vus directement, les objets réalisés par Murayama avant la guerre.
En fait Gutai innove parcequ'il aborde la peinture tout simplement, en partant de la vie et du corps même. Ainsi Gutai a suivi - surtout à ses débuts vers 1954 - 57 - une voie à la fois anti art et apolitique. En provoquant un épanouissement spontané des performances - lesquelles incarnent une caractéristique très japonaise liée à la spécificité du groupe -, il précède des tendances ayant acquis par la suite une dimention internationale, land art, art cinétique, minimal art ou art conceptuel. Si les réalisations de Gutai ont été remarquées à l'étranger, c'est sans doute parcequ'un grand nombre d'entre elles font référence à la tradition, quite à l'envisager de façon négative. Citons par exemple Murakami Saburô qui déchire de son corps projeté une suite de feuilles de papier tels des paravents ou des cloisons alignés en enfilade.

Gutai parie sur le corps originel, " naturel ", libre encore de l'emprise des systêmes. Ainsi dans le happening de Satô Seiichi, qui se débat dans le sac où il enfermé, ou bien encore sous une forme plus symbolique chez Shiraga Kazuo qui, parti d'une formation de peintre japonais traditionnel, finit par peindre avec les pieds, affirmant ainsi le corps au détriment de l'habileté pour mieux épouser l'action.

Dans leur vieillesse, de nombreux artistes japonais novateurs reviennent aux souces. Le cas de Gutai est différent dès le départ, sa dynamique cherche à faire ressortir un particularisme japonais disparu. "